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Protection des majeurs : une ordonnance met - enfin - à jour les codes de la santé publique et de l'action sociale

Publié le 13 mars 2020par Jean-Noël Escudié / P2C

 

Cette ordonnance est "relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d'accompagnement social ou médico-social à l'égard des personnes majeures faisant l'objet d'une mesure de protection juridique". Elle procède à un sérieux toilettage des deux codes, notamment pour les adapter aux évolutions intervenues avec et depuis la loi de 2007. Elle prend notamment mieux en compte les différenciations intervenues entre les différentes formes de tutelle et l'apparition de nouveaux dispositifs, comme le mandat de protection future. Elle prévoit aussi les modalités d'association des personnes sous tutelle aux mesures les concernant.

Une ordonnance du 11 mars 2020 procède à un sérieux toilettage des codes de la santé publique et de l'action sociale. L'objectif – qui peut sembler un peu tardif treize ans après – est de mettre les dispositions de ces deux codes en conformité avec la loi de référence du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs et avec les modifications et évolutions intervenues depuis lors. Le gouvernement a été habilité à prendre cette ordonnance par l'article 9 de la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. L'habilitation porte sur "toute mesure relevant du domaine de la loi visant à modifier, dans un objectif d'harmonisation et de simplification, les dispositions fixant les conditions dans lesquelles est prise une décision portant sur la personne d'un majeur qui fait l'objet d'une mesure de protection juridique et, selon les cas, intervenant en matière de santé ou concernant sa prise en charge ou son accompagnement social ou médicosocial".

Lever les contradictions entre les codes et la loi de 2007

L'objet principal de l'ordonnance reste toutefois de mettre un terme aux contradictions ou aux incohérences qui existent entre le régime de protection instauré par la loi de 2007 – qui a modifié notamment des dispositions du code civil – et les dispositions particulières prévues par le code de la santé publique (CSP) et par celui de l'action sociale et des familles (Casf), prévoyant notamment l'intervention d'un représentant légal. A ces contradictions, qui nuisent à la lisibilité du dispositif, s'ajoute le fait que le code de la santé publique raisonne le plus souvent uniquement sur la tutelle, alors que la loi de 2007 a diversifié les modes de protection des majeurs (mandat de protection future, habilitation familiale...). Enfin, l'ordonnance entend harmoniser le code civil – dans ses dispositions issues de la loi de 2007 –, qui privilégie l'autonomie du majeur protégé, et le code de santé publique, qui privilégie plutôt la protection du majeur par le tuteur. L'ordonnance du 11 mars 2020 adapte donc les dispositions spécifiques du CSP et du Casf au regard des mécanismes de décision applicables à la protection juridique des majeurs prévus par le code civil.

Santé : information et consentement aux soins

La première partie de l'ordonnance est ainsi consacrée à une mise à jour du CSP. Outre de nombreuses harmonisations terminologiques – le terme "tuteur" disparaît au profit de "personne chargée de la mesure de protection juridique" –, elle prend en compte la conception nouvelle de la place du majeur protégé pour la prise de décisions concernant sa santé. Elle adapte ainsi les articles du CSP relatifs au droit à l'information médicale, au consentement aux soins, aux directives anticipées, à la création du dossier médical partagé et à l'organisation de l'accès à ce dossier. Ces articles sont également mieux structurés, de façon à bien distinguer les règles applicables aux mineurs, systématiquement représentés par une personne majeure capable (en principe les parents), et celles applicables aux majeurs protégés.

Ainsi, les informations nécessaires à la prise de décision doivent être adressées, en première intention, à la personne protégée et le texte opère une distinction entre la personne chargée de représenter le majeur protégé et celle chargée de l'assister, dans le cadre d'une mesure de protection étendue à la personne. De même, les professionnels de santé devront veiller à adapter l'information délivrée au majeur à ses facultés de compréhension et de consentement, afin qu'il puisse consentir de façon personnelle s'il est en état de le faire. Dans le même esprit, l'information de la personne chargée d'assister le majeur protégé est subordonnée à l'accord de ce dernier, au regard du secret médical. Le consentement aux actes médicaux doit en outre émaner du majeur à chaque fois qu'il est apte à exprimer sa volonté, sauf pour des actes médicaux particulièrement graves ou invasifs.

Social : association renforcée au projet d'accueil et d'accompagnement

La seconde partie de l'ordonnance procède au toilettage des dispositions concernées du code de l'action sociale et des familles. Outre l'harmonisation de la terminologie, elle distingue, elle aussi, la question de la représentation des mineurs de celle des majeurs protégés. Sur la question de l'exercice des droits et libertés individuels garantis à toute personne prise en charge par des établissements et services sociaux et médicosociaux, l'ordonnance introduit dans le Casf une rédaction plus précise et davantage respectueuse des droits de la personne protégée.

Là où l'article L.311-3 du Casf garantissait "la participation directe ou avec l'aide de son représentant légal à la conception et à la mise en œuvre du projet d'accueil et d'accompagnement qui la concerne", la nouvelle rédaction introduite par le Casf prévoit ainsi "la participation directe de la personne prise en charge à la conception et à la mise en œuvre du projet d'accueil et d'accompagnement qui la concerne. Cette personne bénéficie de l'aide de son représentant légal, s'il s'agit d'un mineur ou, s'il s'agit d'un majeur faisant l'objet d'une mesure de protection juridique à la personne qui n'est pas apte à exprimer sa volonté, de la personne chargée de cette mesure, qui tient compte de son avis".

En termes de mise en œuvre, l'ordonnance s'applique aux mesures de protection juridique en cours au jour de son entrée en vigueur et aux actes médicaux ou médicosociaux pour lesquels aucune décision n'a été prise au jour de son entrée en vigueur

 
 
Ordonnance n° 2020-232 du 11 mars 2020 relative au régime des décisions prises en matière de santé, de prise en charge ou d'accompagnement social ou médico-social à l'égard des personnes majeures faisant l'objet d'une mesure de protection juridique
 

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